Article de Jean-Claude MARGERIDOU P40 complété par Philippe HERVET
C’est le 09 juillet 1932 que Monsieur Albert Lebrun Président de la République portait création de l’école des Apprentis Mécaniciens des Forces Aériennes. L’Armée de l’Air naît, quelques mois plus tard, d’un décret du 01 avril 1933 et l’école devient alors: Ecole des Apprentis Mécaniciens de l’Armée de l’Air. La construction de l’école débute en 1931 sur le site de ROCHEFORT-SOUBISE pour se terminer en 1933. La première promotion, forte de 101 élèves entre le 03 novembre 1932 et la seconde débute les cours en octobre 1933. Les formations se poursuivent jusqu’en 1940 et de nombreux mécaniciens sont alors confrontés à l’invasion allemande. Nombreux sont ceux qui par leur engagement ont marqué d’une empreinte indélébile l’histoire des ARPETES durant la seconde guerre mondiale mais peu sont encore de ce monde pour nous la raconter.
En parcourant les colonnes du journal Sud Ouest, et ayant séjourné quelques mois à SAINT SEURIN SUR L’ISLE, un nom, a retenu tout particulièrement mon attention:
BERTHOME Marcel. Ancien Apprenti Mécanicien de l’Armée de l’Air!
Ce centenaire, au parcours hors du commun, honoré comme il se doit à Rochefort et dans sa région natale, mérite sûrement plus que quelques lignes dans notre revue.
Le lundi 04 avril 2022, jour anniversaire de Marcel BERTHOME, une cérémonie aussi généreuse que solennelle a célébré le parcours du soldat, du sportif et de l’élu dans son village natal de SAINT-MEDARD-DE-GUIZIERES dans le Libournais.
Cela fut l’occasion en particulier de retracer la carrière de cet Ancien Apprenti Mécanicien de l’Armée de l’Air .
En 1938, il passe avec succès le concours d’entrée à l’école des apprentis mécaniciens de l’Armée de l’Air de Rochefort, mais trop jeune, il doit attendre le mois d’avril 1939 pour intégrer l’école.
En raison des circonstances du moment c’est à NÎMES qu’il est breveté mécanicien radio télégraphiste le 01 juin 1940. Des notes excellentes lui permettent de prétendre à une affectation en unité aérienne. Il embarque à Marseille le 19 juin 1940 et débarque à ORAN le 21 juin 1940, veille de la signature de l’armistice avec l’Allemagne.
Il réalise alors son rêve lors de son affectation au groupe de bombardement 2/32 à AGADIR au MAROC ou il vole sur DOUGLAS DB7 BOSTON qui équipe cette unité.
Après le débarquement alliés en Afrique du Nord en novembre 1942, il est affecté au groupe de bombardement 1/25 TUNISIE et rejoint la GRANDE BRETAGNE le 25 novembre 1943.
Les GB 1/25 TUNISIE et 2/23 GUYENNE, les fameux groupes lourds, tous deux arrivés d’Afrique du Nord, sont intégrés au Bomber Command de la ROYALE AIR FORCE.
Il passe 6 mois en tant que radio dans les bases écoles de MADLEY, AFU DUMFRIES, OTU LOSSIEMOUTH et HCU de RUFFORTH pour la plupart en ECOSSE et rejoint en juin 1944 la base aérienne d’ELVINGTON, d’où opèrent les Groupes Lourds Français.
EQUIPAGE DU CAPITAINE MULLER -1/25 TUNISIE
2ième Escadrille 1944
Pilote: S/Lt QUESNEL, Navigateur : Cne MULLER (CDT d’avion), Bombardier : Adj PLEINDOUX ,
Radio : Sgt BERTHOME Marcel (le plus à droite), Mécanicien : *Sgt GEMOT, Mitrailleur-supérieur :
Sgt BECK, Mitrailleur-arrière : Sgt BEYER.
Il effectuera 38 missions au dessus de l’Allemagne sur bombardier quadrimoteur HALIFAX.
Il est à noter que durant cette guerre un équipage sur deux du Bomber Command n’est pas rentré de mission.
A la fin des hostilités, il rejoint la France et quitte l’Armée de l’Air en 1946 pour intégrer l’école des navigants d’Air France. Il retrouve l’Armée de l’Air en 1952 au sein du Centre d’Instruction des Equipages de Transport ( CIET) de TOULOUSE FRANCAZAL.
Affecté au groupe de Transport 2/64 ANJOU en Extrême Orient il effectue des missions de transport, de matériels, de personnels et de parachutages sur l’Indochine, le Cambodge et le Laos. Ces missions le conduisent au largage de matériel sur la cuvette de DIEN BIEN PHU jusqu’à la fin des combats.
En 1954, à la fin des hostilités il rejoint le Centre d’ Expérience Aérienne Militaire de MONT DE MARSAN et participe aux essais des matériels de communication sur NORD 2501.
De 1955 à 1962 les missions se succèdent : Brazzaville en 1955 avec des missions sur le CONGO, le GABON, le CAMEROUN, le CENTRE AFRIQUE le TCHAD , des opérations sur le TIBESTI ou il vole sur junkers 52 et sur DC3, puis au Centre d’essais en vol de CAZEAUX avec des vols sur Gloster Météor et Vautour 2 B, au Groupe Aérien Mixte Outre Mer de BAMAKO avec des missions sur le SENEGAL, le NIGER, la MAURITANIE, la surveillance de la frontière algérienne en vue de repérer la pénétration de troupes et d’armes au profit des rebelles et à l’Escadron d’Outre Mer EOM 81 sur la Base Aérienne 164 d’ATAR en MAURITANIE ou il vole sur DASSAULT 315.
De retour en France en 1962, il est affecté Groupement Instruction sur la Base Aérienne 702 d’AVORD pour obtenir le brevet de navigation aérienne et effectuer le stage de commandant de bord. Il demande et obtient sa mutation avec famille pour REGANNE.
Sa dernière affectation est le poste d’adjoint au chef des opérations de l’Escadron Outre-Mer 88 de DJIBOUTI qu’il quitte en 1968.
Il fait alors valoir ses droits à la retraite en 1971 et sera promu au grade de Commandant de réserve.
Il totalise plus de 7500 heures de vol et 454 missions de guerre .
Il est l’un des rares militaires français à porter en plus de la médaille militaire qui est la plus haute décoration destinée aux Sous-Officiers et aux soldats, la Légion d’Honneur qui est la plus haute décoration française. Il est également décoré de la croix de guerre 39-45 avec quatre citations dont deux avec palme et de la croix de guerre des théâtres d’opérations extérieures avec quatre citations dont trois avec palme.
C’est durant cette période militaire que Marcel épouse Yolande qui lui donnera deux filles : PASCALE en 1961 et ANNE en 1963.
RIEN NE PREDESTINAIT CE FILS DE CHARCUTIER A UNE TELLE DESTINEE. SON NOM RESTE ETERNELLEMENT LIE A L’AVENTURE DE L’AS SAINT SEURIN.
Deux ballons de foot, de multiples médailles, des dizaines de cadres, des photos, des centaines de livres… le bureau de Marcel BERTHOME est à l’image de sa vie.
De sa naissance à SAINT-MEDARD-DE-GUIZIERES à son titre de plus vieux maire de France, se seront écoulées trois guerres, deux épopées footballistiques en deuxième division et huit mandats d’élu. Celui qui a suivi l’ascension d’Hitler en Allemagne, rencontré Antoine de SAINT-EXUPERY , repéré Lilian LASLANDES et travaillé avec Robert BOULIN, a soufflé le lundi 04 avril 2022 sa centième bougie.
Au sortir de la guerre, il y débarque comme joueur, prend le brassard de capitaine, puis la casquette d’entraîneur avant de finir comme président. Le tout entrecoupé de nombreuses missions comme en témoignent ses états de service. La rigueur, pour ne pas dire la discipline militaire insufflée par Marcel hisse peu à peu le petit club local en division d’honneur, en championnat de France amateur, puis en D4, D3 jusqu’à l’accession en D2 en 1989.
Parmi ses plus belles réussites, le repérage d’un certain LILIAN LASLANDES auquel il fera signer son premier contrat en 1991. C’était un président passionné. Avoir permis à un petit village d’accéder à la D2 et de voir le stade plein à chaque match le rendait fier et heureux.
A la fin des années 1990, une entente verra le jour avec le club de LIBOURNE et permettra à Marcel de revivre l’euphorie d’une montée en ligue 2, aussi éphémère fut-elle.
Ce militaire de carrière à la réussite sportive insolente endosse l’écharpe de Maire, qu’il ravit pour une voix en 1971 et qu’il conserve jusqu’en 2020.
A cette époque SAINT SEURIN-SUR-L’ISLE , avec ses 1500 habitants se voulait principalement ouvrière. Il va s’employer à développer les commerces locaux, améliorer les équipements existants et en créer de nouveaux. Personnage local aux convictions fortes et aux méthodes parfois discutées. L’essor de sa commune, 3000 habitants aujourd’hui, a fini par éclipser toute critique.
Reste que l’homme, aussi clivant soit-il, sait se rendre attachant. Même ses idées arrêtées sur la guerre d’Algérie n’ont pas entamé l’estime qui lui est portée. Malgré son caractère un peu rude Marcel est quelqu’un de très sensible, qui a de l’attachement aux personnes et le sens de l’accueil. Il n’est pas rare qu’une visite dans son bureau se conclut par un apéritif. Avec pour Marcel, un petit perroquet. Peut-être le secret de sa longévité?
* Dans cet équipage se trouve également le Sgt GEMOT Pierre , mécanicien navigant formé à ROCHEFORT en 1937, décédé en service aérien commandé le 20 octobre 1952 en INDOCHINE et parrain de la Base Aérienne 721 : ADJUDANT GEMOT Pierre.
Avec la coopération de Linda DOUIFI (Sud Ouest)
MARGERIDOU Jean Claude P40
Actualité de Marcel BERTHOME par Philippe HERVET
L’actualité m’oblige à compléter l’article de mon ami Jean-Claude MARGERIDOU. En effet, le 14 mars 2023, Marcel BERTHOME s’est vu remettre les insignes de Grand Officier de la Légion d’Honneur sur la Base Aérienne 106 de Bordeaux-Mérignac.
© Radio France – Jules Brelaz
Marcel BERTHOME à fêté son 101ème anniversaire le 4 avril 2023.
Pour les inconditionnels et pour les Arpètes, ne manquez pas cette vidéo de YouTube